Le « grand-père » resté en France
par Marc Doré
De récentes analyses génétiques ont établi un lien de parenté entre deux ancêtres Doré en Amérique, ce qui vient modifier ce qu’on sait de l’histoire des familles porteuses de ce patronyme.
Louis Doré, arrivé à Québec en 1666, et Jean (Baptiste) Doré, arrivé en 1730, 64 ans plus tard, ont en effet un ancêtre commun deux ou trois générations avant Louis, en France. On ignore s’ils le savaient, l’un ou l’autre. Et comme ils ne savaient pas écrire, et que leur histoire ne méritait sans doute pas d’être racontée aux yeux de leurs contemporains, il n’y a pour ainsi dire que peu de chances qu’il existe des traces écrites de leurs liens de parenté.
C’est donc par l’analyse génétique que cette intéressante découverte a été faite, en collaboration avec le groupe de recherche génétique Projet Québec ADNy et l’Association des Familles Doré. Deux volontaires Doré, dont l’ancêtre connu est Louis et son fils Pierre-Louis pour l’un, et Jean pour l’autre, ont acheté une analyse de leur ADN paternel (y) de la société américaine Family Tree sous la supervision de Projet Québec ADNy; l’AFDI a aussi contribué financièrement à cette opération. Les résultats des deux analyses permettent de confirmer le lien de parenté proche entre les deux lignées.
Selon les registres, Louis et Jean Doré sont originaires de l’ancienne région française de la Saintonge; leurs localités d’origine connues sont situées dans l’actuel département de la Charente-Maritime, à moins d’une centaine de kilomètres de distance.
On sait de Louis qu’il est né vers 1636, fils de Pierre et Hilaire Fergé, du Vivier-Jusseau, actuellement dans la commune de Chives en Charente-Maritime, à la limite des départements de la Charente et des Deux-Sèvres. Il arrive à Québec en 1666 et signe un contrat d’engagé de trois ans. Louis épouse à Québec le 1er septembre 1670 une Normande orpheline de père, Jeanne Dufossé, originaire de la paroisse Saint-Léger de la ville d’Évreux, arrivée en Nouvelle-France en 1669. Il obtient aussi une terre dans la seigneurie Des Maures, près de Québec. Le couple aura six enfants, nés entre 1671 et 1682 : Pierre-Louis (1671), Marie-Madeleine (1673), Jeanne-Angélique (1676), Françoise (1678), Étienne (1680), Michel (1682).
On a eu récemment plus de détails sur Jean Doré, né en 1700, le 16 septembre. Il est le fils de Jean, né vers 1670 et décédé avant le 15 avril 1725, et Marie Bouyer, née vers 1672, décédée après le 15 avril 1725; Jean et Marie s’étaient mariés le 26 octobre 1693 à Chaniers, près de Saintes, ancien chef-lieu de la Saintonge. La famille de Jean et Marie comptera cinq enfants :
- Mathieu Doré, né à Chaniers le 16 août 1695, marié avec Marie Brossard, née vers 1705; contrat de mariage le 15 avril 1725 à Saintes;
- Jean Doré, né à Saint-Sauvant le 16 septembre 1700
- Jeanne Doré, née à Saint-Sauvant, le 6 août 1702;
- Guillaume Doré, né à Saint-Sauvant le 21 janvier 1705;
- Anne Doré, née à Saint-Sauvant le 7 septembre 1706.
Les informations concernant Jean Doré ont été fournies à l’AFDI par monsieur Christian Siguret, président du Cercle Généalogique de Saintonge. Plusieurs des informations sont publiques depuis peu, à la suite du dépouillement des archives de la paroisse de Saint-Sauvant. Le CGS est un des participants du système en ligne GENEABANK, une mise en commun d’archives BMS de plusieurs régions de France.
Selon ce qu’on savait au Québec sur Jean Doré, des informations résumées sur le fichier Nos Origines, Jean Baptiste Doré serait né vers 1701, à Saint-Vivien, Saintes. Christian Siguret dit être l’auteur de cette fiche constituée il y a quelques années, qui présente quelques imprécisions à la lecture des informations qu’il nous a données récemment.
On note dans les informations transmises par M. Siguret, que le patronyme Doré varie énormément dans le temps, comme on peut le constater dans les registres paroissiaux. Ainsi, Jean Doré père s’est marié sous le nom Doray avec Marie Bouyer. Leur premier enfant, Mathieu est aussi Doray, mais le second, Jean, se nomme Doret ou Dores. Jeanne, qui suit dans la fratrie, se nomme aussi Doret, mais sa marraine se nomme Jeanne Doray. Guillaume qui naît ensuite, est enregistré sous le patronyme Doré, mais Anne la dernière s’appelle Doray. (Pour information, le patronyme du descendant de Jean qui a fourni son ADN pour analyse est Dorais.)
Louis et Jean étaient âgés d’une trentaine d’années quand ils sont arrivés en Amérique, à 64 ans d’intervalle. On constate aussi que Jean le père est né à peu près au moment où Louis a commencé sa famille, qu’il était donc en âge d’être son fils… ou son neveu. On peut faire l’hypothèse en effet que ce Jean Doray, qui vivait à Chaniers, était le petit-fils de Pierre, père de Louis, et donc issu du frère de ce dernier. Des analyses génétiques plus poussées seront nécessaires pour préciser le lien de parenté entre les ancêtres Louis et Jean Baptiste. L’analyse d’un nouveau prélèvement, provenant d’un descendant du second fils de Louis qui a eu des descendants, Étienne, pourrait donner aux chercheurs des éléments nouveaux d’analyse.
On ne trouve plus de Doré au Vivier-Jusseau quand on consulte le bottin téléphonique, mais il y en a dans les communes environnantes comme Villiers-Couture et Fontaine-Chalendray. On trouve aussi des Doré plus à l’est, autour de Poitiers, le chef-lieu de l’ancienne région du Poitou dont faisait partie le Vivier-Jusseau. Mais surtout, il y a encore des Doré dans la région de Saintes.
On peut donc dire que les Doré sont originaires du Poitou et de la Saintonge, quoique ces deux anciennes régions du royaume de France ont eu des frontières changeantes au cours de leur histoire mouvementée et qu’elle sont souvent désignées comme un tout, « Poitou-Saintonge ». Les deux font partie de la région de Nouvelle Aquitaine.
RAPPELS
- Saint-Sauvant est situé tout près de Saintes, tout comme Chaniers, au centre de la Charente-Maritime
- Chives est une commune située à l'extrême est de la Charente-Maritime dans une pointe qui s'enfonce entre la Charente et les Deux-Sèvres
- Saint-Vivien est situé à l'ouest, près de Rochefort, sur la côte, dans l’Aunis